Volvo 264 TE : joue-là comme Honecker !
En vous parlant de la Volvo 244 DLS spécifique au marché est-allemand (lire aussi : Volvo 244 DLS), j’avais évoqué l’étrange limousine 264 TE, sans plus rentrer dans les détails. Il est temps aujourd’hui de vous en parler un peu plus, même s’il est difficile de trouver beaucoup d’informations sur cette voiture rallongée sur base Volvo 264 équipée du bon vieux PRV qui, dans sa version suédoise, prend le doux nom de B27E !
Bon, reprenons depuis le début. La 264 TE est la version limousine (à 4 portes seulement) de la berline 264. Il s’agissait pour Volvo de répondre à la demande du gouvernement suédois de disposer de véhicules officiels, et de toucher une riche clientèle désireuse de rouler « suédois ». Le marché était petit, mais intéressant en terme d’image. Et c’était sans compter un étrange client : le gouvernement est-allemand.
Durant les années 80, j’avais l’impression que la RDA était le pays le plus proche de l’URSS au delà du rideau de fer, en tout cas bien loin des excentriques Yougoslavie ou Roumanie, toujours prêtes à prendre leurs distances avec le Kremlin. La RDA pour moi, c’était le fidèle d’entre les fidèles. Si politiquement l’Allemagne de l’Est l’était effectivement, dans les faits, les allemands sautaient sur toutes les occasions de se démarquer des alliés soviétiques.
Hors de question pour Erich Honecker, qui dirigeait la RDA d’une main de fer, de rouler en ZIL ou autre Tchaïka (lire aussi : GAZ Tachaika M14), et encore moins en Tatra 613, question d’honneur (lire aussi : Tatra T613). Impossible aussi de se fournir en limousine chez les frères ennemis de la RFA, chez Mercedes notamment : c’était politiquement incorrect, une faute qui aurait pu coûter cher. Alors quoi de mieux que Volvo, une marque de solide réputation (à tous les sens du terme), fabriquée dans un pays neutre, et disposant d’une limousine dans son catalogue.
Cette limousine n’était pourtant pas totalement suédoise. Conçue et vendue par Volvo, elle était pourtant fabriquée chez Bertone, en Italie. Le constructeur suédois y fera aussi construire son coupé 262C (lire aussi : Volvo 262C). La 264 TE (pour Top Executive) est donc une 264 classique rallongée de 70 cm, disposant de 3 rangées de sièges, et équipée d’un radio-téléphone (ce qui dans les années 70 et 80, fait partie du summum du luxe).
Après quelques modèles de pré-série en 1975, la production démarre en Italie en 1976, et se poursuivra jusqu’en 1981. Quelques modèles seront ensuite produits au compte goutte par le carrossier suédois Nilsson jusqu’en 1984. C’est d’ailleurs à Nilsson que l’on doit les deux exemplaires de la 264 TE Landaulet destiné à Erich Honecker pour les défilés officiels. Ces deux modèles existent toujours, l’un étant au musée de la RDA de Berlin, et l’autre, allez savoir pourquoi, au Samsung Transport Museum en Corée du Sud.
Au total, 335 exemplaires de cette limousine seront construits en Italie et en Suède, dont une bonne partie partira en RDA (certains évoquent la moitié de la production). Nilsson ayant récupéré la production en fin de vie du modèle, il deviendra ensuite le carrossier attitré du constructeur suédois pour ses versions limousines. La 760 aura aussi droit à sa déclinaison « stretched » à 4 ou 6 portes (la RDA fut évidemment un bon client), tout comme la 960, dénommée Executive.
On trouve en Allemagne des 264 TE à vendre, si le cœur vous dit de retrouver ce petit parfum de guerre froide, tout en offrant à votre petite famille un espace de vie digne d’un monospace, la modularité en moins. Sachez qu’il existe aussi des versions break rallongées dotées de 4 cylindres et destinées aux taxis et aux aéroports, appelés 245 Transfer !
Lire aussi: La Stasi roulait en Citroën