Skoda Favorit : une révolution tchèque !
Y’a des jours comme ça où on a envie d’écrire sur des sujets incongrus ! Y’a des jours comme ça où nous reviennent en mémoire des voitures incongrues ! Y’a des moments où l’on se rappelle qu’une Skoda, ce n’était pas encore totalement une jumelle d’un modèle Volkswagen. Voilà pourquoi, en ce jour de mai, on écrit un article sur la Skoda Favorit. Je vois déjà des yeux se lever au ciel ! Allons mes amis, sachez que cette Favorit, à défaut d’être la plus belle des voitures de la fin des années 80, a eu pour bonnes fées Porsche et Bertone, et a révolutionné la marque tchèque bien plus que son air débonnaire ne le laisse croire.
Au début des années 80, l’Etat est encore l’actionnaire unique de la société Skoda. Si la marque Tatra se réserve le haut de gamme (lire aussi : Tatra 613), Skoda se concentre sur les petites voitures populaires et sportives. Pourtan es deux marques de ce qui s’appelait encore la Tchécoslovaquie avaient un point commun : leurs voitures étaient des propulsions à moteur arrière. Pourtant, à l’heure d’étudier la remplaçante de la Skoda 105 (type 742), c’est une décision stratégique qui va être prise, et pour tout dire un changement d’esprit tout à fait en phase avec l’esprit d’ouverture qui flotte à l’Est du mur : passage à la traction et au moteur avant, et collaboration avec l’Ouest pour ce qui est du design et de l’ingénierie !
Le programme du type 781 est lancé dès 1983 en faisant appel à Bertone pour le style. C’est alors le designer à la mode, très représentatif de ce début des années 80, et qui signe la toute nouvelle Citroën BX, mais c’est aussi un créatif aux idées arrêtées qui aura du mal à s’accommoder des directives incessantes de l’état Tchécoslovaque et entraînant du retard dans le projet. Skoda fera appel à Porsche en terme d’ingénierie et pour la réalisation des prototypes. D’énormes investissements seront réalisés pour industrialiser et commercialiser la Favorit, qui reprend le nom d’une berline de luxe produite avant-guerre.
Ce n’est qu’en 1987 que commence la production de la nouvelle petite familiale tchèque, moderne et sexy (selon les critères de l’époque). Elle est dotée d’un 4 cylindres maison issu de la 125 de 1,3 litres et développant suivant les versions entre 54 et 68 chevaux. En revanche, nul trace de diesel dans la gamme. Elle sera déclinée en version break (dite Forman) à partir de 1990 et en version pick up à partir de 1991. Au total, entre 1987 et 1995 (date de l’arrêt du pick up), ce sont 783 167 berlines, 223 059 Forman et 70 900 pick ups qui tomberont des chaînes.
Le projet de coupé signé BertoneBertone avait aussi étudié une berline 4 portes et un « hatchback » 3 portes qui furent toutes deux refusées. Sur la 3 portes, on reconnaît bien le style Bertone et ce petit « décroché » au niveau de la vitre qu’on retrouvera ensuite sur la Citroën XM (rien ne se perd jamais en matière de design). Une autre étude plus récréative sera présentée en 1989, la Tremp, une version « de loisir et à arceau » de la Favorit qui restera lettre morte elle aussi. Une version cabriolet sera proposée par le carrossier Metalex à environ 150 exemplaires (lire aussi : Favorit Roadster).
La Skoda Trend de 1989La Favorit révolutionnera donc la philosophie Skoda, l’entraînant dans le monde de l’automobile moderne. Avec plus d’un million d’exemplaire vendus sur un marché devenu concurrentiel après la chute du mur, c’était bien joué, d’autant que la petite tchèque n’avait pas à rougir face aux marques occidentales, contrairement à d’autre modèles de l’Est.
Mais les investissements colossaux consacrés à son étude et à son industrialisation et l’explosion du modèle socialiste après la chute du mur obligea l’Etat à se désengager de ses fleurons et à vendre au plus offrant. Après une âpre bataille, c’est Volkswagen qui remportera le morceau face à Renault, et développera la marque avec le succès que l’on sait. Pourtant, Skoda était rentrée toute seule dans l’ère moderne et avait déjà réussi sa mutation grâce à cette petite Favorit qui mérite donc qu’on la regarde avec un autre œil. Celles qui ont échappé aux primes à la casse se négocient pour des bouchées de pain !
Photos: Skoda