CLASSICS
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Rover P6 : révolution à l’anglaise

Par PAUL CLÉMENT-COLLIN - 17/05/2019

On l’imagine mal aujourd’hui, mais la sortie de la Rover P6 sur le marché en 1963 fut une vraie révolution tant cette élégante voiture moderne et performante n’était pas attendue, du moins chez Rover. Elue voiture de l’année en 1964, elle modifia durablement l’image de Rover jusqu’alors très conservatrice, voire ringarde, les anglais n’hésitant pas à surnommer la marque “auntie” (tata en français). C’était sans doute pour changer cette image de marque que fut étudiée et lancée la P6 qui, en plus, récupèrera un V8 en 1967 au point d’éclipser la P5 pourtant plus haut de gamme.

La prototype Rover T4.

Il faut se remettre dans le contexte de la fin des années 50 : depuis plus de dix ans, la marque anglaise ne vit quasiment que sur son modèle P4, lancé en 1949. Elle sera relayée en 1958 par la P5 plus haut de gamme, mais dont le style restait très traditionnel. Rover dans l’Angleterre des années 50, c’est un peu comme Peugeot en France : des produits ne cherchant pas l’esbrouffe, fiables, sûrs et bourgeois… Tout le contraire de Citroën qui va pourtant inspirer la marque au Drakkar désireux de changer radicalement son image. Avec le projet T4, Rover veut aller loin : un design dans la même veine que la française et une petite révolution mécanique, une turbine à la place du traditionnel moteur thermique.

Rover change d’image

Les anglais veulent dynamiser leur image, mais n’iront pas aussi loin que prévu : le proto T4 de 1961 accouche d’une berline P6 plus conventionnelle, tant en terme de style que techniquement. Bien sûr, l’influence de Flaminio Bertoni sur les lignes de la nouvelle berline anglaise se ressent, mais c’est moins flagrant. De même, en lieu et place d’une turbine, on trouve sous le capot un 4 cylindres beaucoup plus classique, mais l’ensemble paraît tellement détonnant par rapport aux P4 et P5. L’objectif de Rover est clair : toucher une nouvelle cible, plus jeune, toujours un peu bourgeoise mais attirée par la modernité.

Entre la P5 et la P6, on voit tout de suite l’écart de génération.

On va donc leur proposer une voiture de taille moyenne (entre la P4 et la P6 quoi) équipée d’un moderne 4 cylindres (en lieu et place des L6 des 50’s) développé pour l’occasion et développant 102 chevaux (il évoluera jusqu’à 124 chevaux sur la 2000 TC à double carburateurs). La coque est autoporteuse, les 4 freins sont à disques, la carrosserie comprend des panneaux d’aluminium tandis que la suspension est assez innovante, bref, on est loin de la Rover “à Papa” de la décennie précédente. A l’intérieur, ce n’est ni Rolls, ni Bentley, ni même Jaguar, mais on reste dans cette fameuse ambiance so british, avec un peu moins de bois et de cuir cependant.

Le V8 s’invite à la fête

Les Rover P6 2000, 2000 TC et 2000 Automatic (sortie en 1966) entre donc en croisade et rencontre son public. Obtenant le 1er titre de Voiture de l’année en 1963, les P6 à 4 cylindres vont s’écouler à 208 875 exemplaires entre 1963 et 1973. En 1965, Rover fait l’affaire de l’année en rachetant les droits d’un V8 Buick abandonné par la marque américaine car a priori trop cher à produire, l’Aluminum Fireball. Comme le berceau moteur avait été prévu large pour accueillir une turbine qui ne vint jamais, pas de problème pour y caser ce gros moteur et pour faire monter en gamme la P6 à partir de 1965.

Ce moteur est une aubaine pour Rover qui le casera partout où cela sera possible : la P6 donc, mais aussi la SD1 qui lui succède, le Range Rover “classic”, la Triumph TR8 ou le Range P38 dans les années 90. Avec ses 3,5 litres de cylindrée et ses 155 chevaux, la P6 devient une berline “de taille moyenne” tout à fait respectable, voire désirable : la princesse Grace de Monaco sera séduite par ce modèle puissant, confortable mais discret (avec lequel elle trouvera malheureusement la mort). Les modèles 3500 V8 feront beaucoup pour l’image de ce modèle, préparant le terrain pour la deuxième révolution Rover, la SD1. Produite entre 1967 et 1977, elle trouvera 81 057 clients tout de même.

Succès d’estime

En 1973, les versions 4 cylindres de la P6 évoluent, passant de 2 litres à 2,2 litres : la puissance reste à peu près la même (98 chevaux en simple carbu, 117 en double carbu) mais le couple est privilégié. Elles resteront en vente elles aussi jusqu’en 1977 et l’arrivée de la SD1, s’écoulant à 32 370 unités. Au total, 322 302 P6 écumeront les routes d’Angleterre, d’Europe ou d’ailleurs en 14 ans de production.

Aujourd’hui, les P6 sont peu connues du grand public, beaucoup plus des spécialistes : elles font partie de ces anglaises inclassables à mi-chemin entre “cheap” et classe et qui font toujours leur petit effet, et le V8 américain fait sans doute moins peur qu’un V12 Jaguar des années 70. Alors ? Pourquoi ne pas s’offrir un bout d’Albion avec cette voiture iconoclaste ?

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