Melkus RS 1000 : la sportive venue de l'Est
Oui je sais, on a du mal à l’imaginer, mais il y a eu des voitures de sport au delà du rideau de fer, et notamment en Tchécoslovaquie et en Allemagne de l’Est. Oui je sais, on se souvient plus des Trabant (lire aussi : Trabant 601) ou des Wartburg 353 (lire aussi : Wartburg 353) que de la Melkus 1000 RS (pour Renn Sport), et c’est bien dommage. Heureusement, Boîtier Rouge est là pour vous la rappeler !
Portes « papillon », carrosserie en polyester, ligne aérodynamique, profil bas et (très) sportif, on est loin de l’imagerie des voitures est-allemandes, et pourtant, la RS 1000 est bien une voiture estampillée DDR (RDA en français), fabriquée dans la bonne vieille ville de Dresde. Et si cette Melkus est le fruit du travail d’un passionné de sport automobile, Heinz Melkus, n’allez pas croire qu’il a développé sa voiture au nez et à la barbe des autorités : non non, il s’agit d’un projet tout à fait officiel, commandé en 1968 à Melkus par l’ADMV (l’équivalent de l’Automobile Club en RDA) pour célébrer les 20 ans de la création de la RDA.
Il s’agit donc d’un enjeu national. Heinz Melkus s’est fait connaître en produisant des voitures de compétition destinées au championnat «Formule Junior » entre 1959 et 1963 (25 exemplaires) puis à la Formule 3 (92 ex entre 1964 et 1969). Melkus, c’est un peu le pape de l’automobile sportive en Allemagne de l’Est, et c’est tout naturellement à lui qu’on s’adresse pour fabriquer cette sportive censée rivaliser avec les production occidentale.
Melkus ne va pas tout faire dans son coin. Il va s’associer avec l’Université Technique de Dresde, l’Académie des Arts de Berlin, et s’appuyer sur les ingénieurs de l’usine d’Eisenach d’AWE, qui produit la Wartburg 353. C’est d’ailleurs cette dernière qui se cache sous la ligne gracile de la RS 1000 : oui, cela paraît improbable, mais pourtant, c’est vrai. La Wartburg va donc donner un certain nombre d’éléments à sa sœur sportive : le châssis (raccourci), les suspensions, le freinage, la direction, et le pare brise… Sans oublier le moteur, ce petit 3 cylindres deux temps de 900cm3 de cylindrée, ex-DKW. Il sera retravaillé, évidemment, pour offrir un surcroît de puissance grâce à l’ajout de 3 carburateurs, et à l’augmentation de la cylindrée (à 992 cm3).
Au total, ce sont 70 chevaux qui sortent de l’antique 3 cylindres, mais la voiture, étudiée en soufflerie, est très aérodynamique et ne pèse que 750 kg. De quoi en tout cas offrir d’autres sensations qu’au volant d’une Trabi ou d’une Wartburg. La version compétition aura même droit à 100 ch ! Une version 1.1 litre de 90 ch sera bientôt proposée en 1972.
La voiture entre en production en 1969, et poursuivra sa carrière jusqu’en 1980. Mais en 12 ans, seuls 101 exemplaires seront produits. Il faut dire que la production était plutôt artisanale, et surtout, une RS 1000 coûtait 30 000 ostmarks, une petite fortune dans la RDA de l’époque. C’était d’ailleurs l’ADMV qui choisissait qui aurait le droit de posséder une RS 1000, et il fallait en outre posséder une licence sportive : conséquence, il était possible, si l’on respectait les conditions d’attributions, de n’attendre qu’un ou deux ans sa voiture, contrairement au « quidam » devant patienter 10 ans sa Trabant.
La production cessa donc en 1980, mais l’histoire de la RS 1000 ne s’arrête pas là. Le fils et le petit fils d’Heinz Melkus, Peter et Sepp, devenus concessionnaires BMW à Dresde, décident de relancer Melkus. Quinze exemplaires de la RS 1000 seront construits comme à l’origine, et vendu près de 50 000 marks. 5 exemplaires, appelés RS 1600, seront lancés, équipés d’un 4 cylindres 1.6 litre de 102 ch d’origine Volkswagen.
La maquette de la RS 2000 face à son ancêtre, la RS 1000Enfin, en 2009, Melkus présentera un nouveau modèle, la RS 2000 fortement inspirée de la Lotus Elise, mais dotée de portes papillon comme son ancêtre RS 1000. Quelques exemplaires seulement furent construits avant de déposer le bilan en 2012 (lire aussi : Melkus RS 2000). Il sera sûrement plus facile de trouver une RS 1000 qu’une RS 2000, mais la faible production, et la cote de popularité de l’engin en Allemagne rendront vos recherches ardues, et il vous faudra sans doute débourser une belle somme pour en acquérir une. Cependant, une fois votre exemplaire en main, vous vous assurerez un certain succès dans les rassemblement, avec la sempiternelle question : « mais c’est quoi cette voiture ? » « Melkus ? Connais pas ! »