Citroën 2CV UMAP 425 / 435 / 500 SM : une autre vision de la Deudeuche
Il existe de nombreux dérivés de la Citroën 2CV, mais il en est de plus célèbres que d’autres. Dans la catégorie 2CV méconnues, on trouve l’UMAP SM, un petit coupé à carrosserie polyester fabriqué dans l’Aube entre 1956 et 1960 à une poignée d’exemplaires. Plutôt élégante, l’UMAP ne rencontrera jamais le succès par manque de soutien de Citroën et, par conséquent, à cause d’un tarif délirant. Dommage car, à l’instar d’Alpine et son A106 présentée en 1955 (une Renault 4CV recarrossée), l’UMAP aurait pu devenir le pendant chic et sportif de Citroën.
Depuis 1949, la 2CV se partage avec la 4CV le marché des “petites voitures populaires” privilégié par le Plan Pons pour motoriser la France et développer l’industrie automobile française. C’est donc sur la base de l’une ou de l’autre que des apprentis sorciers tenteront de diversifier l’offre vers des petites sportives ou des petits cabriolets. Brissonneau & Lotz présentera ainsi sa Rosier, quand Vernet-Pairard tentera vainement de lancer son Coach 4CV. Jean Rédélé quant à lui, après avoir tenté l’aventure Le Marquis, lance l’Alpine A106 sur une base 4CV. Du côté de la 2CV, De Pontac tente d’imposer une barquette et Jean Dagonet s’illustre avec une deudeuche améliorée (avec une préparation moteur) et recarrossée pour une meilleure pénétration de l’air.
L’UMAP et Dagonet s’attaquent à la 2CV
Et l’UMAP (Usine Moderne d’Applications Plastiques) me direz-vous ? L’entreprise est née au tout début de l’année 1956 et récupère les travaux de Jean Dagonet justement : un coupé 2+2 sur base Citroën bien entendu. Les locaux se trouvent à Bernon, dans l’Aube, et l’instigateur s’appelle Camille Martin, ingénieur de son état et maire dudit village. Mais derrière cette officine agit en sous-main l’inaltérable Dagonet, malgré quelques soucis de santé. Après avoir revendu sa société de préparation moteur à un Anglais et à Pontac (précédemment cité), il se lance aux côtés de Martin pour lancer l’UMAP 425 SM.
Les soubassements sont ceux de la 2CV, mais la carrosserie, en fibre de verre (ou polyester), est habilement dessinée (et fabriquée) avec l’aide de Chappe et Gessalin qui travaillent déjà pour Alpine et qui soutiendront plus tard Charles Deutsch et sa CD Panhard, voire créeront leur propre marque : CG. La ligne est élégante et s’inscrit dans la tendance de ce milieu des années 50, anticipant même les lignes de la Floride, mais surtout celles de la DB Le Mans.
Une alternative dynamique et stylée
L’idée des deux camarades, Martin et Dagonet, est simple : offrir à la clientèle une alternative un peu plus dynamique et stylée à la 2CV. Sous le capot, le bicylindre de la 2CV s’offre une cylindrée de 425 cc (14 chevaux au lieu de 12 pour la Citroën), 435 cc (19 chevaux) et même 500 cc (26 chevaux) pour un poids de 500 kg à sec contre 560 kg pour la 2CV. Un premier proto est prêt en mars 1956 (sur la base des travaux déjà initiés de Dagonet) puis deux modèles sont réalisés pour le Salon de Paris d’octobre de la même année.
Sous la verrière du Grand Palais, l’UMAP 425 SM (ou 435 / 500 suivant la cylindrée du moteur) fait sensation grâce à sa ligne et la renommée de Jean Dagonet dont les 2CV “à sa sauce” avaient impressionné les amateurs de rallye au début des années 50. Certes, la vedette du Salon reste la nouvelle Renault Dauphine tandis que la DS, présentée l’année précédente, reste l’une des vedettes, mais les débuts sont encourageants et laissent espérer une aide officielle de Citroën à l’instar de celle accordée par Renault à Alpine : la fourniture de châssis et de moteurs directement depuis Javel.
Sans le soutien de Citroën, point de salut
Malheureusement, Citroën ne voit pas les choses de la même façon. Pierre Bercot, alors Directeur Général (il ne deviendra PDG qu’en 1958) ne jure que par la DS et ne voit aucun intérêt à soutenir des initiatives telles que celle de l’UMAP. Hors de question de favoriser qui que ce soit d’autant que la 2CV se vend toute seule ou presque. L’UMAP devra donc se débrouiller toute seule, soit acheter des deuches neuves dans le réseau et les transformer a posteriori. De toute façon, Citroën ne voit pas (à l’époque) l’intérêt d’une telle diversification et ne soutiendra même pas la Bijou développée et vendue par ses propres équipes à Slough, en Angleterre.
Hachette Miniatures proposera une version 1/43ème de l’UMAPCe manque de soutien de Javel sera le principal écueil de la petite marque auboise : avec ce système, l’entreprise ne peut pas sortir ses 425 ou 435 à un prix raisonnable, sans même parler de la 500 cc qui en outre souffre d’une fiscalité supérieure (3CV). En gros, une UMAP coûte plus de 900 000 francs, soit le double d’une 2CV normale. Martin et Dagonet vont tenter de faire perdurer l’aventure. Les objectifs de 100 exemplaires par an ne seront jamais tenus et on estime qu’entre 1957 et 1960, environ 50 unités sortiront des ateliers.
Aujourd’hui, il vous sera extrêmement difficile de trouver une UMAP malgré un taux de conservation élevé : on estime qu’une trentaine d’exemplaires sont encore en vie, mais seulement 5 ou 6 roulantes. Trouver un exemplaire est donc possible, convaincre son propriétaire pourquoi pas, mais évaluer sa valeur sera ardu, tant les transactions sont rares. À vous de voir si le jeu en vaut la chandelle !