CLASSICS
CLASSICS
FRANÇAISE

Simca 1300/1500 et 1301/1501 : la berline raisonnable

Par CLÉMENT-COLLIN - 02/08/2022

Au début des années 60, la firme Simca est encore bien active sur le marché automobile français, mais se trouve malgré tout dans une situation mouvementée : les capitaux manquent tandis que Fiat se désengage petit à petit pour laisser la place au géant américain Chrysler. Si l’argent américain permet de lancer la petite Simca 1000, la gamme doit impérativement se renouveler pour profiter du boom des années 60. Pour conquérir à nouveau la clientèle de la classe moyenne émergente, Simca va donc lancer un duo de berlines bien sous tous rapports, les 1300 et 1500.

Les années 50, sous la houlette d’Henri Pigozzi, avaient été relativement fastes pour Simca, sans pour autant dégager suffisamment de cash pour envisager de se passer d’un “protecteur”. C’est ainsi qu’à partir de 1958, Ford (actionnaire depuis la vente de sa filiale française Ford SAF à Simca) liquide ses derniers 15 % tandis que le puissant allié italien, Fiat, commence aussi à se désengager. À la manoeuvre, le groupe américain Chrysler qui voit en Simca la tête de pont idéale pour conquérir l’Europe. L’argent frais apporté en dot permet de se lancer, enfin, sur le marché des voitures populaires avec la petite 1000, mais le reste de la gamme est à revoir de fond en comble.

Du sang neuf pour Simca

Si les Plein Ciel et Océane sont remplacées par un élégant Coupé 1000 encore très italien, il s’agit d’un marché de niche. Sur les gammes supérieures, la Vedette hors d’âge est arrêtée en 1961 sans véritable descendance tandis que l’Aronde P60 commence à souffrir sur le marché des berlines intermédiaires, tout comme l’Ariane placée un peu plus haut dans la gamme. Il faut donc réagir et lancer un nouveau modèle pour ne pas se laisser distancer par Peugeot qui vient de lancer une très réussie 404, sans parler de Citroën qui, avec son duo ID et DS truste le marché de la berline.

Pour conquérir ou reconquérir la clientèle, Simca va opter pour une démarche “à la Peugeot”, loin de l’excentricité de Citroën. Pour plaire au plus grand nombre, il faut avant tout ne pas déplaire ! C’est ainsi que Mario Revelli de Beaumont (designer reconnu et authentique Comte italien) dessine une voiture équilibrée, sobre, classique en tous points, mais s’éloignant des rondeurs démodées de l’Aronde P60 et de la baroque Ariane. D’ailleurs, tout est sobre dans cette voiture, jusqu’à son nom (1300 dans un premier temps, puis 1500 un an après) : adieu noms poétiques, Ariane, Aronde, Trianon, Versailles, Marly ou Régence, place à des chiffres et rien que des chiffres, dans le sillage de la Simca 1000 lancée en 1961.

Même la Police adopte la 1500 de chez Simca !

Lignes et sobres et prudence technique

Côté technique, l’Aronde se cache encore beaucoup sous l’élégant dessin de Revelli : propulsion, essieu arrière rigide, et 4 cylindres culbutés “Rush” à 5 paliers de 1 290 cc de 54 chevaux. Certes, les suspensions ont été améliorées, tout comme les trains roulants. Pour les freins en revanche, on reste très classique avec 4 freins à tambours, en attendant mieux. La voiture est lancée en mars 1963 et la 1300, sans faire des étincelles, prend paisiblement pied sur le marché. Ce sera la dernière voiture développée sous l’ère Pigozzi, brutalement licencié cette même année.

Le Break 1500, avec son fond plat, fit le bonheur des familles !

En 1964, la 1500 vient épauler la 1300 avec un 4 cylindres de 1 475 cc et 69 chevaux. Plus cossue que sa soeur 1300, elle est aussi un peu plus moderne, avec des freins à disques à l’avant (la 1300 les recevra en 1965 seulement) ! Elle peut aussi, influence américaine oblige, recevoir en option une boîte automatique. À la fin de cette même année, une version break complète la gamme 1300/1500. Malgré sa relative discrétion, le duo 1300/1500 est une alternative très crédible sur le marché, peut-être même l’une des meilleures (grâce notamment à une certaine prudence technique, loin des avancées technologiques compliquées de Citroën qui, parfois, rebutent une clientèle conservatrice).

Des 1300/1500 aux 1301/1501

Au milieu des années 60, on travaille d’arrache-pied, chez Simca, au lancement d’une berline intermédiaire capable de lutter face à la toute nouvelle Peugeot 204 : ce sera la 1100 s’intercalant entre la 1000 et les 1300/1500. Pour ne pas souffrir de luttes intestines, on décide donc de faire grandir les deux berlines (mais pas le break, étrangement) en les rallongeant de près de 20 cm, leur donnant un air plus statutaire. Elles prennent alors les noms de 1301 et 1501, et reçoivent un restylage histoire de les garder dans le coup. Lancés fin 1966, ces deux modèles continuent leur brillante carrière. En 1969, la gamme récupère du muscle avec la 1501 Spécial dont le moteur est porté à 81 chevaux, et qui récupère un levier de vitesse au plancher. Quelques mois plus tard sort la 1301 Spécial de 70 chevaux. La paire a encore fière allure.

La 1301 Special

Les années 70 seront plus compliquées. Certes, elles restent au catalogue jusqu’en 1976 (la production s’arrête, elle, dès 1975), mais la gamme se rétrécit. La 1501 tire sa révérence dès 1972 pour ne pas concurrencer les Simca-Chrysler 160, 180 et 2 litres. Les dernières 1301 se vendent au compte-gouttes, d’autant qu’en juillet 1975 sort le projet C6 sous les noms de 1307, 1308 et 1309, beaucoup plus modernes. Néanmoins, les 1300, 1301, 1500 et 1501 auront fait le job : avec 1 343 000 exemplaires vendus en un peu plus de 10 ans, le contrat est rempli.

Bizarrement, malgré une production non négligeable et une présence sur les routes françaises encore habituelle au début des années 80 (j’en ai encore des souvenirs), cette honnête et vaillante berline a disparu de l’imaginaire populaire. Son design et ses solutions techniques trop sages y sont sans doute pour beaucoup, et ce malgré une petite carrière cinématographique dans Playtime, de Jacques Tati. Quoi qu’il en soit, c’est aujourd’hui un bon moyen de se mettre à l’automobile ancienne sans se ruiner et avec une élégance désuète aujourd’hui charmante.

Carjager vous recommande

undefined
Simca Plein Ciel / Océane : du sang Facel dans les veines
Vous rêvez d’une Facel Vega sans en avoir les moyens ? J’ai peut-être trouvé la solution à votre problème. Et si vous achetiez une Simca ? Oh je vois votre sourire sarcastique. Pour vous, Simca ce sont sans doute les souvenirs des années 60 et 70, d’une marque populaire, croquée par Chrysler puis par Peugeot pour enfanter Talbot. Vous n’aurez pas vraiment tort. Mais dans les années 50, ce n’est pas tout à fait le cas.
PAUL CLÉMENT-COLLIN - 12/09/2022
Lire la suite
undefined
Matra Bagheera U8 M560 : il en faut peu pour être heureux
C’est le leitmotiv universel de Baloo. Il l’entonne pour Mowgli à la fin du film Le Livre de la jungle avec Bagheera en veilleuse attentionnée. En France, la panthère noire docte a été métamorphosée en auto colorée. Matra avait imaginé un modèle voulu plus félin encore que sa panthère, avec un gros moteur français, ce qui n’existait plus depuis au moins vingt ans, avec beaucoup de cylindres, deux fois plus que l’auto nationale courante. Il s’en est fallu de peu pour être heureux comme un amateur d’automobile devant un moteur original, fonctionnel et puissant selon les canons de son époque. La Matra Simca Bagheera U8 n’a jamais rejoint la jungle automobile des Mangusta (espèce féliforme) et Pantera de chez De Tomaso, des Jaguar (évidemment) ou les taureaux furieux de Modène, comme l’Urraco. Près de 50 ans plus tard, on rêve tout haut en se disant qu’il s’en est fallu de peu pour ce petit bonheur automobile.
Jean-Jacques Lucas - 10/08/2022
Lire la suite
undefined
Simca Chrysler 160/180 et 2 litres : espèce en voie de disparition
Lorsqu’au début des années 80 je me faisais ma culture automobile personnelle le nez collé sur la vitre arrière de la Peugeot 304 familiale, on croisait encore des Simca Chrysler 160 ou 180, et parfois 2 litres. Des berlines venues d’on ne savait où, mêlant style américain (en moins bien) et gabarit européen et qui semblaient déjà vieillottes par rapport à la 304 de mon père sortie, elle, deux ans plus tôt. En 1971, la direction de Chrysler Europe croyait pourtant dur comme fer à cette voiture conçue à Poissy et qui devait concilier le meilleur des deux mondes.
PAUL CLÉMENT-COLLIN - 03/08/2022
Lire la suite

Vendre avec CarJager ?