Isuzu Piazza: un coupé décalé devenu rare !
Les voitures japonaises sont parfois méconnues des français, surtout celles des années pré-Gran Turismo, le célèbre jeu vidéo qui d’une certaine manière popularisa la Nissan Skyline en France. Mais quand il s’agit en plus d’un constructeur quasi inconnu par le quidam, imaginez un peu ! Et enfin quand il s’agit d’un modèle jamais vendu en France, autant vous dire qu’ils sont peu nombreux ceux qui connaissent l’Isuzu Piazza.
Pourtant, cet élégant coupé a tout d’une voiture internationale : dessinée par Giugiaro (Italie), travaillée par Lotus (Angleterre) du moins à partir de 1987, produite par Isuzu (Japon) dont le principal actionnaire est GM (USA). Il y avait de quoi en faire une voiture « mondiale », et pourtant elle est particulièrement rare, surtout aujourd’hui !
L’Asso di Fiori donnera naissance à la Piazza !Tout commence donc en Italie, à la fin des 70’s, où Giugiaro (Italdesign) est mandaté par Isuzu pour dessiner un possible remplaçant au coupé 117 qui arrive en fin de vie (lancé en 1968, il terminera sa carrière en 1981 après 85 000 exemplaires produits, lire aussi: Isuzu 117). Le créateur de la VW Golf, mais aussi de la Lotus Esprit (entre autres nombreuses réalisations), dessine alors un élégant coupé aux lignes modernes largement inspirées par le coupé Scirocco signé… Giugiaro pour VW !
Joli ptit cul non ?Le concept car « Assi di fiori » est présenté au Salon de Tokyo 1979 et rencontre son petit succès. Il faut dire que Giugiaro offre à son proto une légèreté rare à l’époque grâce au camouflage du pilier central donnant l’impression d’une large surface vitrée d’un seul tenant. L’avant fait très Esprit, et s’offre des phares « semi-escamotables » tandis que l’arrière propose un cul rebondi à la façon des coupés de l’époque (Porsche 924, ou la Renault Fuego, lire aussi : Renault Fuego).
A l’intérieur c’est très 80’s !En cette toute fin des années 70, le concept de Giugiaro est d’une étonnante modernité, et les dirigeants du plus petit constructeur japonais décident de produire ce coupé à partir de septembre 1980. Au passage, il perd un peu de sa légèreté par rapport au concept, et gagne des rétroviseurs sur le capot moteur pour les versions japonaises. Côté technique, la base est celle de la berline Gemini sortie en 1974 (autant dire qu’elle date un peu), tout comme les moteurs : des deux litres, un simple arbre à cames de 120 chevaux, et un autre double arbre à cames de 135 ch. A partir d’avril 1984, une version turbo développant 180 ch sera proposé à la clientèle, faisant de la Piazza (son petit nom commercial) une vraie sportive…
Enfin une vraie sportive, pas exempte de tout défaut par ailleurs. La presse anglaise notamment n’hésitera pas à critiquer tenue de route et suspensions de ce coupé aux soubassements antiques ! C’est d’ailleurs à l’initiative de l’importateur anglais International Motors, qui récupère la marque japonaise en portefeuille en 1987 après un incroyable imbroglio commercial (après la faillite d’Isuzu UK, Alan Day, un concessionnaire, racheta puis brada tout le stock de Piazza arrivé par bateau), qu’un travail de remise à niveau et de restylage est effectué avec le concours de Lotus. Le petit constructeur de Hethel va en effet revoir les suspensions incriminés pour répondre aux critiques de la presse. Le nouveau modèle prendra ce sous-titre sur toutes les communications : « handling by Lotus » et les amateurs du modèles le différencient des autres par les trois lettres HBL. Et comme Lotus appartient à GM, la boucle est bouclée, et la solution sera adoptée sur toutes les Piazza à partir de l’AM 1988.
Mais revenons un peu plus avant. La Piazza doit être l’un des fers de lance d’Isuzu à l’export, et la voiture est introduite en 1983 aux Etats-Unis (sous le nom d’Impulse), puis en Australie sous le blason Holden (propriété de GM), et enfin en Grande Bretagne en 1985 ! Malgré les retouches de 1987, les meilleures suspensions « by Lotus », le moteur Turbo plus puissant, la voiture ne décollera jamais !
A la décharge d’Isuzu, son réseau commercial outre-atlantique était ridicule malgré l’appui de GM, tandis qu’en Angleterre, les marques japonaises (et particulièrement Isuzu) étaient limitées par des quotas. Entre 1985 et 1990, il s’en vendra seulement 1662 exemplaires en Grande Bretagne. Difficile de trouver un chiffre fiable du nombre d’exemplaires produits et vendus. Certains parlent de 13 000 exemplaires jusqu’en 1990, ce qui me paraît bien peu, tandis qu’Italdesign sur son site parle de 100 000 exemplaires, ce qui pour le coup me paraît exagéré.
Isuzu s’appuiera beaucoup sur Lotus pour communiquer à la fin des années 80 !Toujours est-il qu’elle sera remplacée en 1990 par une nouvelle Piazza qui elle non plus ne rencontrera pas le succès malgré une version canadienne sous la marque Asüna (lire aussi : Asuna). Elle sera arrêté après seulement 3 années de commercialisation ! Dès lors, Isuzu se concentrera sur ses véhicules utilitaires et tout terrains, et notamment sur son grand succès, la Mu, qui donnera naissance à notre Opel Frontera (lire aussi : Isuzu Mu).
Trouver une Piazza aujourd’hui relèvera d’une vraie chasse au trésor. Selon l’Isuzu Piazza Turbo Owners Club (http://iptoc.com/), seuls 40 exemplaires survivraient encore en Grande Bretagne. A moins d’aller fouiner aux States, en Australie ou au Japon, peu de chance de vous distinguer en France avec un tel engin tellement 80, tellement décalé, et tellement BR en fait !