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CITADINE
ITALIENNE

Autobianchi A112 : élégance et charme latin

Par Aurélien Charle - 20/08/2020

Lorsque la BMC Mini débarque en Italie sur l’invitation d’Innocenti, le groupe Fiat a le poil que se hérisse. La firme nationale turinoise reste toutefois bien trop frileuse pour s’aligner en personne face à ce qu’elle considère encore comme une extravagance. C’est donc sous l’insigne Autobianchi qu’est lancée la contre-attaque planifiée par le grand Dante Giacosa. Plus novatrice que sa British de concurrente, pourvue d’un charme à tomber et envenimée par le sorcier Abarth, l’Autobianchi A112 va réussir à imposer son élégance chic et choc et se faire une place de choix sur les marchés européens.

Le cobaye de Fiat

Quand l’Austin-Morris Mini a jeté un maxi pavé dans la mare, les marques italiennes, retranchées derrière les taxes de douane auxquelles le Royaume-Uni était soumis, n’ont pas soupçonné qu’un astucieux biais allait être exploité. Innocenti, qui depuis plusieurs années s’efforce de pénétrer le marché automobile italien, avait déjà fabriqué des modèles BMC sous licence. Après en avoir renégocié les conditions, le constructeur milanais obtient l’accord d’assembler la BMC Mini à partir de 1965. Archaïque face à sa rivale italo-britannique, la Fiat 500 a véritablement du souci à se faire et la philosophie automobile de Fiat reste encore très éloignée du concept d’avant-garde.

À l’instar de l’expérience effectuée avec la Primula en 1964, c’est Autobianchi, filiale du groupe turinois, qui se retrouve à partir sur le champ de bataille afin d’essuyer les plâtres en cas d’échec. C’est également l’occasion pour Fiat de pouvoir tester sa propre interprétation de la petite citadine à moteur transversal afin de pouvoir reprendre ces procédés sur la future Fiat 127 une fois ceux-ci bien éprouvés. Dante Giacosa est appelé à l’œuvre et propose une idée plus moderne et plus polyvalente de la Mini. Conservant des dimensions contenues, la future Autobianchi sera plus habitable en adoptant dix-huit centimètres supplémentaires en longueur, et, surtout, en se munissant d’un hayon arrière. Concernant la mécanique, on récupère le 903 cc des Fiat 850 Sport, on ramène sa puissance à 44 chevaux qui assurent 135 km/h en vitesse de pointe et le tour est joué.

Le coquet fruit résultant de ces études est présenté à l’automne 1969 à l’occasion du salon de Turin. Le succès est immédiat et dépasse les espérances au point de devoir amplifier les cadences de production pour tenter de raccourcir les (déjà) longs mois d’attente pour la livraison. Fiat a frappé dans le mille et démarre la nouvelle décennie en grande pompe puisque l’Autobianchi A112 se retrouve seconde au palmarès de la Voiture de l’Année 1970, juste derrière la… Fiat 128 !

L’A112 se dote d’une version Abarth

Toujours tendance !

L’Autobianchi A112 est agile, maniable et un tantinet snob. Pour continuer de satisfaire l’automobiliste italien, toujours avide de nouveauté, et de dominer toutes ces modes qui se démodent, l’A112 n’a droit à aucun repos sur ses lauriers. Dès 1971 la gamme se diversifie tandis qu’elle adopte la version 47 cv de son moteur monté sur la Fiat 127 afin d’unifier la production. Une nouvelle finition dite Elegant est lancée, principalement reconnaissable à son toit de couleur différente et à sa finition léchée, aux côtés d’une version Abarth préparée par les soins du sorcier du même nom et bien décidée à en découdre avec une certaine Mini Cooper qui ne cesse de faire parler d’elle.

L’A112 Abarth revendique 982 cc de cylindrée pour délivrer 58 chevaux DIN grâce à une augmentation de la course et d’un nouveau vilebrequin en acier nitruré. Cette mécanique revue et corrigée emmène donc les 700 petits kilos de l’engin à plus de 150 km/h dans des accélérations plutôt impressionnantes. Toujours pour se montrer plus aguichante, elle dispose d’une présentation spécifique en arborant une calandre bien à elle faisant la part belle au patronyme de son prestigieux préparateur, de jantes spécifiques et, comme toute sportive seventies digne de ce nom, d’éléments de carrosserie de couleur noir mat censés protéger le pilote de tout éblouissement.

Ainsi parée, l’A112 piquée par le Scorpion incarne une redoutable rivale de la Mini Cooper avantagée par sa modernité, son confort indubitablement meilleur et son aspect pratique. En résumé, l’A112 en général a réussi son pari tout en ayant également réussi à faire de ses origines une des plus importantes parts de son charme.

La magie du bistouri 

L’Autobianchi A112 se démarque également de sa rivale anglaise en misant sur le relooking ultra-redondant pour s’inscrire dans la durée. Dès le printemps 1973, la série 2 apparaît. Celle-ci se caractérise par des retouches concernant la face avant, les jantes, la planche de bord, les sièges et, pour les modèles cossus, de nouveaux pare-chocs noirs plus larges à bande chromée. L’Elegant est disponible d’une seule couleur et l’Abarth ne dispose plus que de son capot peint en noir mat. Cette seconde série ne sera présente au catalogue que pendant deux années, la troisième collection faisant son apparition au début de 1975.

Cette fois-ci, les transformations se montrent plus significatives. Les feux arrière rectangulaires s’élargissent et reçoivent un feu de recul sur les finitions cossues. L’A112 de base s’appelle désormais Juventus et reçoit de petits enjoliveurs en plastique noir tandis que l’Abarth se voit munie d’un bloc-moteur de 1 050 cc de 70 chevaux mis au point par la filiale Fiat-Automoveis brésilienne, offrant à la petite sportive un beau 160 km/h en pointe. À l’intérieur, les panneaux arrière ont été modifiés afin de gagner de l’espace en largeur et pouvoir homologuer l’A112 pour le transport de cinq passagers. Les grilles présentes sur les panneaux arrière latéraux se sont élargies. Les normes européennes de pollution commencent à sévir et, alors que l’Abarth gagne de la puissance, les Juventus et Elegant voient leur puissance respectivement descendre à 42 et 45 chevaux.

La quatrième série arrive fin 1977 avec un petit lot de changements significatifs. Outre les modification esthétiques de la proue et de la poupe, on note une surélévation de 2 centimètres du pavillon arrière afin d’améliorer l’habitabilité générale. De nouveaux pare-chocs plus épais en plastique habillent les finitions haut de gamme tandis que l’Abarth reçoit un capot bossu qu’elle ne quittera désormais plus. L’habitacle est également retouché afin de recevoir sa présentation quasi-définitive jusqu’à l’arrêt de production.

Une nouvelle version du moteur munie d’une cylindrée de 965 cc et d’une puissance de 48 chevaux apparaît sur l’Elegant. Cette quatrième série reste celle produite sur la plus courte période puisqu’elle disparaît au début de l’année 1979. La cinquième série qui lui succède est considérée comme le véritable aboutissement du modèle. Cette fois-ci, la chirurgie devient encore plus plastique puisque ce matériau se retrouve encore plus en abondance sous forme de bandes latérales, d’enjoliveurs de passage de roue et même d’un panneau arrière entourant de tous nouveaux feux redessinés et servant de support à la plaque minéralogique. Le montage d’un cinquième rapport de boîte de vitesses est enfin disponible et la gamme reçoit un allumage électronique. La version de base se voit rebaptisée Junior tandis qu’une nouvelle finition Elite vient s’intercaler entre l’Elegant et l’Abarth.

La sixième série apparaît en 1982 au Salon de Paris. Les modifications les plus importantes se trouvent dans un allégement de la présence de plastique, plutôt excessive sur la précédente série. Les clignotants avant sont désormais intégrés au pare-choc tandis que de nouveaux feux arrière rectangulaires sans entourage apparaissent. Quelques retouches justifiant l’apparition d’une septième série apparaissent en 1984 avec, notamment, l’adoption d’un large bandeau rouge réfléchissant en lieu et place de la plaque minéralogique arrière désormais installée sur le bouclier, redessiné pour l’occasion. L’ultime série, dite « Unifiée », apparaît en 1985 sous la forme d’une seule et unique A112 comparable à une finition Junior pourvue de quelques raffinements supplémentaires.

Un beau succès !    

Grâce à ces habiles replâtrages, l’Autobianchi A112 put durer jusqu’en 1986, se bonifiant comme un bon Chianti, s’adaptant subtilement aux changements voulus par la modernité, donnant l’impression constante d’un nouveau modèle, le tout sans sacrifier son attachante personnalité. Diffusée à plus d’un million d’exemplaires, elle devint un élément familier des grandes agglomérations et des rallyes européens. En France, elle fut d’abord distribuée par le réseau Citroën avant que le téméraire réseau Chardonnet la prenne sous son aile, faisant preuve d’un dynamisme qui ne fut pas étranger au succès notable de la petite italienne dans l’Hexagone.

Cette cote d’amour n’a pas faibli et l’A112 se révèle encore furieusement à son aise dans les artères saturées de nos grandes villes, n’y rencontrant comme seul obstacle que la désormais indispensable vignette Crit’Air qui la rend indésirable hors des promenades dominicales. L’Autobianchi A112 possède la majeure partie des caractéristiques d’une auto populaire des années 1970 : une forte diffusion, une conduite dans laquelle tout conducteur moderne trouve aisément ses marques et l’éternelle corrosion qui, fort heureusement, se fait plus rare sur les exemplaires de la décennie suivante… et comme toute auto mignonne, snobinarde et à forte personnalité : une cote qui ne cesse de grimper !

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