AC Propulsion tzero : Tesla lui doit beaucoup
Lors de mon passage au Mondial de l’Automobile, je suis bien entendu passé faire un petit tour sur le stand Tesla, discuter le coup avec mes contacts et voir de près la Model X que je n’avais pas encore croisé. C’était aussi l’occasion de programmer un essai futur du nouveau modèle Tesla après mon essai de la Model S (lire aussi : Tesla Model S). En discutant sur le stand, je n’ai pu m’empêcher de penser aux débuts, et notamment au Roadster sur base de Lotus Elise : que de chemin parcouru depuis. Mais en cherchant quelques infos supplémentaires, je suis tombé sur autre chose de plus intéressant, l’ancêtre de toutes les Tesla : l’AC Propulsion tzero !
On présente souvent Tesla comme l’idée de génie d’un Elon Musk visionnaire, alors que l’homme n’arrivera dans l’aventure qu’un an après le début de l’aventure, lors de la première grosse levée de fonds. Et pour cette première levée de fonds, Martin Eberhard et Marc Tapenning, les deux fondateurs, se servirent de l’AC Propulsion tzero pour présenter leur projet de voiture de sport électrique aux investisseurs, puis utiliseront sa technologie. Mais alors, qu’est-ce qu’AC Propulsion et cette tzero ? Je vais vous le raconter.
AC Propulsion est une société californienne fondée en 1992 par Alan Cocconi, bientôt rejoint par Wally Rippel. Tous deux avaient participé deux ans auparavant au concept de voiture électrique GM Impact, qui donnera naissance par la suite aux GM EV-1 et Saturn EV-1, produites à un peu plus de 2000 exemplaires entre 1996 et 1999. Les deux hommes sont persuadés que l’électricité peut aussi servir à mouvoir des voitures de sport, et pas seulement des citadines. Ils vont essayer de démontrer que cette énergie peut aussi être performante et donner un autre plaisir de conduite. Ils vont alors travailler sur un roadster sportif électrique au doux nom de tzero (comme le temps zéro mathématique).
Le premier prototype sera opérationnel en 1997. A cette époque, l’énergie électrique est produite par 28 batteries plomb/acide mises en série, pour une puissance de 150 kW (soit environ 200 ch). Cependant, les 2 prototypes suivant recevront une autre technologie : celle des batterie Lithium-ion. D’une puissance équivalente, mais pesant près de 230 kilos de moins, elles permettent à la tzero d’obtenir des performances remarquables. La tzero est aussi équipée d’un système de freinage permettant la récupération d’énergie. Bref, avec le système AC150 (moteur/batterie/récupération d’énergie) et sa tzero, AC Propulsion va faire des émules.
Petit « plus » amusant de la tzero : elle pouvait recevoir une remorque appelée « Long Ranger », sorte de générateur sur la base d’un moteur 500cc de Kawasaki, apportant une puissance supplémentaire de 27 chevaux. En résumé, avec cette remorque, votre voiture électrique devenait une hybride !
C’est Martin Eberhard, futur fondateur de Tesla, qui semble avoir joué un rôle décisif dans ce changement de type de batterie, et qui encouragera Alan Cocconi à commercialiser la tzero. Et c’est le refus de Cocconi, qui pensait que la tzero coûtait trop cher à fabriquer pour une production en série, qui entraînera la création de Tesla. Cocconi va préférer développer son système de traction et le vendre sous licence, tout en travaillant sur un projet de Toyota Scion électrique appelé eBox. Eberhard sautera sur l’occasion pour lancer sa propre marque de voitures de sport électrique, Tesla.
Tesla va d’ailleurs utiliser d’une part la tzero pour sa première levée de fond, mais aussi la technologie sous licence AC Propulsion, qui sera installée dans les premiers Roadster. Tesla va ensuite faire évoluer cette technologie jusqu’à celle que nous connaissons aujourd’hui, mais en utilisant toujours les brevets ACP. D’autres constructeurs vont d’ailleurs faire appel à Alan Cocconi pour lancer leurs véhicules électriques.
Le plus emblématique, pour nous, français, sera Venturi. Lorsque Gildo Pallanca-Pastor se rendra compte qu’il lui sera difficile de trouver un moteur thermique pour sa Fétish, il décide alors de la transformer en sportive électrique. Pour cela, il va frapper à la porte d’AC Propulsion, et utiliser lui aussi la technologie américaine (tout en taisant son origine). Le destin Venturi sera pourtant radicalement différent de celui de Tesla, pour finir par abandonner la construction de véhicules électriques début 2016 et se concentrer sur l’e-Formula.
La Mini E utilisera elle aussi cette technologie ACP, tout comme le fabricant de supercars Lightning, la Volvo 3CC (un concept-car électrique), ou la petite Thing ! Bref, que du beau monde parmi les clients d’AC Propulsion, qui restera pourtant dans l’ombre, particulièrement celle de Tesla. Aujourd’hui, AC Propulsion continue de proposer des solutions techniques dans le domaine de la propulsion électrique, et vient d’être rachetée le 10 octobre 2016 par le chinois China Chongqing Sokon Industry pour la modique somme de 95 millions de $ !