Porsche 984 "Junior" : les prémices du Boxster
1984, d’Orwell, c’est d’une certaine manière la description anticipée du monde d’aujourd’hui. La 984 quant à elle, c’est la vision so eighties d’un Boxster avant l’heure, une vision d’un futur qu’on voulait proche, chez Porsche, mais qui attendra les années 90, le temps de se refaire une santé financière. Voici donc la petite histoire de la Porsche 984.
D’une certaine manière, Porsche a toujours voulu sortir de la monoculture 911, avec les Porsche à moteur avant (928, 924, puis 944 et 968). Dans les années 80, la marque allemande veut aller plus loin, avec des même des idées de berlines (lire aussi : Porsche 989). Mais avant d’en arriver là, Porsche va réfléchir à une baby-Porsche, nom de code 984.
L’aventure commence étrangement avec Seat. La marque espagnole avait fait appel à Porsche pour la conception de moteurs 4 cylindres pour sa Ronda (lire aussi : Seat Ronda) ou l’Ibiza (lire aussi : Seat Ibiza). Seat n’avait pas encore intégré le groupe Volkswagen (cela arrivera en 1986), et Porsche non plus (rendez-vous en 2012 après avoir cru racheter VW), et les deux marques voyaient d’un bon œil leur travail en commun : pour Seat, c’était un bon en avant en matière de technologie, tandis que pour Porsche, cela faisait rentrer de l’argent grâce à son bureau d’étude. Les deux partenaires vont même aller plus loin en planchant sur un projet de petite sportive à moteur arrière, baptisé PS (pour Porsche-Seat).
La PS restera au stade d’ébauche, mais l’idée va trotter dans la tête des ingénieurs de chez Porsche : et si on offrait une petite sœur à la 911 qui soit plus proche de l’idée qu’on se fait d’une Porsche que la 924 ? La solution était là, sous leurs yeux : la PS ! A partir de 1984, le projet PS donne donc naissance au projet 984, surnommée en interne Porsche Junior : une petite sportive dotée d’un 4 cylindres Boxer placé à l’arrière, et refroidi par air, avec une puissance correcte de 120 à 150 ch. De quoi séduire une clientèle plus jeune avec une vitesse de pointe de 220 km/h mais un prix étudié pour rester proche des 40 000 DM !
Stylistiquement, on retrouve, notamment à l’avant, un dessin proche d’une 928, tandis que l’arrière évoque une 911 modernisée. La voiture est compacte, équilibrée, moderne et valorisante. Entre 1984 et 1987, 10 millions de DM vont être investi pour imaginer 4 versions (coupé, cabriolet, targa, roadster) de cette 984, dont le premier modèle roulera en juillet 1987, tandis que les projets seront présentés au board en septembre de la même année.
Mais en 1988, patatra, le projet fut définitivement stoppé : la crise de 1987 et son fameux krach était passée par là, et les finances commencèrent à manquer chez Porsche tandis que la clientèle des yuppies envisagée, touchée de plein fouet par la chute boursière, se réduisait comme peau de chagrin. Sans moyen, sans marché, Porsche fit ce qu’on appelle profil bas… Adieu 984, adieu aussi projet 989 de berline : il faudrait tenir avec les modèles existant ou à venir, 911, 968 et 928.
Ce n’est qu’au début des années 90 que Porsche se remettra à l’ouvrage pour finir par lancer en 1996 le Boxster, sorte d’héritier de la 984 dix années plus tard, connu sous le nom de Typ 986. Initié en 1992, il n’aura finalement patienter que 4 ans après l’enterrage de la 984, et en gardera la philosophie tout en revoyant les ambitions à la hausse avec un 6 à plat plutôt qu’un 4 à plat. Suivront ensuite le Cayenne et la Panamera pour donner à la gamme la largeur qu’ambitionnait Porsche dès les années 80. Visionnaires, mais aussi persévérant, les hommes de Stuttgart non ?
Images: Porsche AG