Porsche 928 GTS : l’ultime évolution
La Porsche 928, sortie en 1977, connut une longue carrière qui l’amena à ne quitter le catalogue du constructeur de Stuttgart qu’en 1995, atteignant tout juste les 60 000 exemplaires. Cette GT à moteur avant, dotée d’un V8 qui lui était spécifique, devait supplanter la Porsche 911 en haut de la gamme et trouva, cahin-caha, sa clientèle propre, mais elle ne réussit jamais à atteindre l’objectif qui lui était assigné. Malgré un trio de PMA (Porsche à moteur avant) composé de la 924, de la 944 (puis 968) et de la 928, et censé représenter le futur de Porsche, la 911 fit de la résistance au point d’enterrer ses demi-soeurs. La 928, de son côté, évolua petit à petit vers un peu plus de puissance, voire parfois de sportivité, mais sans jamais réussir à sortir de son embourgeoisement. Afin de relancer une dernière fois le modèle, Porsche présenta en 1992 son ultime évolution, la 928 GTS : une voiture qui restera anecdotique commercialement, mais qui s’avère l’une des plus recherchées aujourd’hui.
Dans les années 70, Porsche décida donc de sortir de sa culture du moteur en porte-à-faux arrière pour s’aventurer vers le moteur à l’avant. Le premier modèle à initier cette tendance en 1976 fut la 924, censée offrir une entrée de gamme plus abordable et plus moderne que n’avaient pu l’être la 914 et la 912 E. Rapidement, ce fut au tour de l’ambitieuse 928 d’être proposée au public avec son moteur V8. En 1981, la 944 vint compléter une offre destinée à supplanter définitivement la 911, jugée archaïque et vouée à disparaître. Dès les premières années et durant les années 80, on aurait pu croire le pari gagné tant les volumes de ces trois modèles (mais surtout des 924 et 944) semblaient donner raison aux décideurs de la marque, mais la 911 faisait de la résistance : malgré une sensible baisse des ventes en 1980 et 1981, passant sous la barre des 10 000 exemplaires par an, la vaillante 911 Type G reprit aussitôt du poil de la bête en 1982 pour continuer sa lente mais progressive ascension (seule l’année 1993 la vit tomber à nouveau sous la dizaine de milliers d’exemplaires, à un pénible 7 265 unités, pour cause de passage de flambeau entre la 964 et la 993 : un accident en somme).
De toute façon, Porsche avait déjà décidé de revenir à son ADN développé depuis la 356 Gmünd et confirmé par la 911 Type 901 : le moteur resterait à l’arrière et les modèles à moteur avant seraient sacrifiés. On tenta cependant une dernière fois de booster les ventes de ces modèles, avec une 968 qui modernisait le concept de la 944, et une 928 GTS appelée à devenir le summum de la lignée, toutes deux mises en vente en 1992. Les jours étaient comptés mais les PMA tentaient un dernier baroud d’honneur. La 968 fit un bide, tout comme la 928 GTS. Pourtant, cette dernière offrait vraiment des performances très intéressantes : 275 km/h en vitesse de pointe (5 km/h de mieux qu’une 911 Turbo, et à peine 5 de moins qu’une 911 Turbo S).
La plus aboutie des 928…
Pour obtenir ce chiffre flatteur, le V8 à 32 soupapes de la GT passait de 5 à 5.4 litres (51 mkg à 4 250 tr/minute) et gagnait 20 chevaux pour culminer à 350 : 30 de plus qu’une 911 Turbo et seulement 5 de moins qu’une Turbo S. Mieux : avec un prix catalogue s’élevant à 652 000 F, elle était moins chère de 86 000 F par rapport à la 911 Turbo (et 160 000 F moins chère que la Turbo S !) À lire ces lignes, on se dit que le choix devait être vite fait en concession : choisir la 928 GTS aurait du être une évidence. Pourtant, dès l’année suivante, la 964 Turbo 3.6 évoluait pour offrir 360 chevaux. En 1994, c’était au tour de la 993 d’être ajoutée au catalogue, redonnant encore plus de sex-appeal à la 911.
De son côté, malgré des performances significatives, d’indéniables qualités et une ligne encore séduisante et légèrement restylée par rapport à ses soeurs S4 et GT, la 928 GTS devait se rendre à l’évidence : elle accusait le poids des années, et la clientèle avait fait une croix sur ce haut de gamme un brin malchanceux. Il faut dire que, malgré des chiffres bruts flatteurs (puissance, couple, vitesse), la 928 GTS payait son typage bourgeois plus que sportif du départ. De son côté, la 911 réussissait d’année en année à gommer les trop grandes particularités dues à l’emplacement de son flat six pour devenir de plus en plus civilisée, sans perdre pour autant sa sportivité (merci l’électronique).
… mais aussi la plus recherchée
Le résultat ne se fit pas attendre. À l’heure des comptes, en 1995, seuls 2 904 exemplaires de la GTS étaient sortis des chaînes. Bien trop peu pour espérer durer une année de plus (1995 fut d’ailleurs une Bérézina avec seulement 416 unités). Ironie du sort, c’est aujourd’hui que cette ultime 928 tire son épingle du jeu. Plus récente, plutôt rare, disposant du moteur le plus gros et le plus puissant de sa lignée, elle est devenue particulièrement recherchée et, naturellement, s’avère la plus cotée. Il est encore temps d’en profiter : les amateurs redécouvrent depuis quelques années les qualités des PMA et la cote devrait suivre une pente ascendante, bénéficiant de l’aura du blason et des prix toujours plus hauts de la 911.